dimanche 5 février 2012

Zine Story (partie 2)

Source: Mad Movies (N°14, décembre 1976, par JP Putters).

"Le deuxième désavantage du fanzinat consiste à ne pas parvenir à se créer un circuit de distribution véritablement fonctionnel. A quelques exceptions de librairies accueillantes ou encore intéressées par le travail du fanéditeur, les principaux points de vente ne voient que l’objet commercial qui leur est proposé. Or, chacun sait bien que le faible tirage, et par là-même le coût qu’il représente à l’unité, oblige le fanéditeur à adopter une formule de présentation assez modeste, en ronéo, le plus fréquemment. Persuadé que « cela n’intéressera personne », le libraire remise les exemplaires dans le coin le plus reculé de sa boutique où, l’éventuel acheteur survenant quinze jours plus tard, aura fortement intérêt à se munir d’une fourche pour atteindre l’objet de sa convoitise, vu l’amoncellement de choses hétéroclites qui se seront déposées dessus entre temps.


Et puis, le fanéditeur n’est pas commerçant; on rirait de voir les « théoriques » marches bénéficiaires qui peuvent se calculer. Certains numéros (DE L’AUTRE COTE DU PONT 1 et 2, CERBERE 1, MAD MOVIES 2 et 9, et sans doute bien d’autres titres, nous ne possédons pas leur comptabilité exacte) ont eu un prix de revient à l’unité, qui arrivait à dépasser le prix payé par le libraire.

Enfin, par le simple fait qu’il travaille à deux pas d’une photocopieuse accueillante, ou qu’un de ses camarades possède une ronéo rudimentaire, le fanéditeur peu –tout de suit- livrer un produit encore mal dégrossi. Contrairement au journaliste ou critique professionnel qui parvient à se faire publier grâce à un travail préalable, ou par une certaine renommée, ou encore parce qu’il sort d’une école, qui, que, etc. le brave fanéditeur, lui, a soudain le formidable et inquiétant pouvoir d’apporter tout de suite au lecteur ses B.A. BA, ses premiers pâtés rédactionnels. Sans avoir jamais touché une machine à écrire, sans connaître les moindres rudiments de la mise en page ou des divers procédés d’impression, il livre une passion qui force l’admiration, un ouvrage que le professionnel ne pourra pas regarder sans une condescendance amusée. Le plus grave est que le lecteur partage plus ou moins cet apriorisme et n’est pas toujours tendre dans ses jugements.

Nous n’allons pas ici distribuer de bons ou de mauvais points (d’autant que la plupart des anciens fanéditeurs sont actuellement de nos amis), mais plutôt tenter de faire le tour d’un sujet qui sait être diablement passionnant.
Évidemment, un article comme celui-ci ne ferait pas cent balles dans une autre revue, c’est tout juste assez bon pour Mad Movies, et puis, il fallait peut-être qu’un fanéditeur parle lui-même de la fanédition puisque la presse officielle préfère l’ignorer. Nous allons le faire avec un réel plaisir, d’autant que nombre de titres cités dans cet article méritent amplement ce modeste hommage qui les fera pour un instant revivre."

Partie 3
Partie 1

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